
Source: ZENIT, Agence d'information - Le monde vu de Rome. (ZENIT.org)
Fête du Sacré-Cœur : « Le prêtre, responsable de l'Eucharistie »
CITE DU VATICAN, Jeudi 26 juin 2003 - Voici le texte publié par la congrégation pour le Clergé (http://www.clerus.org/) à l’occasion de la Journée mondiale de prière pour la sanctification des prêtres (vendredi 27 juin, fête du Sacré-Cœur).
Le prêtre, responsable de l'Eucharistie
La fête du Sacré-Coeur de Jésus nous invite à contempler l'amour qui jaillit
de la source inépuisable du Christ, et qui se répand sur toute l'humanité,
à travers " le don par excellence " qu’est l'Eucharistie. La dernière Encyclique
de Jean-Paul II attire notre attention sur la valeur de ce don, absolument
exceptionnel. Ce don divin nous a été destiné, à nous les prêtres, d’une façon
très particulière, et par notre manière de l’accueillir, nous portons la responsabilité
de l'efficacité de l'Eucharistie dans le monde.
Le cri de la foi
En toute célébration eucharistique, après avoir consacré le pain et le vin
pour qu'ils deviennent le corps et le sang du Christ, le prêtre s'exclame
: " Mystère de la foi! " C'est une merveille qui suscite l'adoration, même
si pour les yeux terrestres rien ne semble changé. Dans l'encyclique le Pape
exprime son désir de se mettre avec nous " en adoration devant ce Mystère:
grand Mystère, Mystère de miséricorde " (11). Il ajoute: " Que Jésus pouvait-il
faire de plus pour nous? Vraiment, dans l'Eucharistie, il nous montre un amour
qui va " jusqu’à l'extrême " (cf. Jn 13,1), un amour qui ne connaît pas de
mesure. "
La Messe est mémorial du sacrifice de la croix. " L’Eglise vit continuellement
du sacrifice rédempteur, et elle y accède non seulement grâce à un souvenir
plein de foi, mais aussi par un contact actuel, puisque ce sacrifice redevient
présent, en se perpétuant sacramentellement, en toute communauté qui l'offre
par la main du ministre consacré. De cette façon, l'Eucharistie applique aux
hommes d'aujourd'hui la réconciliation obtenue une fois pour toutes par le
Christ pour l'humanité de tous les temps. En effet, " le sacrifice du Christ
et le sacrifice de l'Eucharistie sont un unique sacrifice " (12).
L'Eucharistie est sacrifice au sens propre, et en premier lieu elle est don
du Christ à son Père: " sacrifice que le Père accepta, en répondant à cette
donation totale de son Fils, qui se fit "obéissant jusqu'à la mort" (Phil
2,8), par sa donation paternelle, c'est-à-dire par le don de la vie nouvelle
et immortelle dans la résurrection. En donnant son sacrifice à l'Eglise, le
Christ a aussi voulu faire sien le sacrifice spirituel de l'Eglise, appelée
à s’offrir également elle-même, avec le sacrifice du Christ ". ( 13)
Plus spécialement, le Souverain Pontife souligne que " le sacrifice eucharistique
rend non seulement présent le mystère de la passion et de la mort du Sauveur,
mais aussi le mystère de la résurrection dans lequel le sacrifice trouve son
couronnement. C’est en tant que vivant et ressuscité que le Christ peut se
faire dans l'Eucharistie " pain de vie " (Jn 6,35.48), " pain vivant " (Jn
6,51).
L'offrande du sacrifice est donc source d'une vie nouvelle. L'efficacité salvatrice
du sacrifice se réalise en plénitude dans la communion: " nous recevons celui-là
même qui s'est offert pour nous, son corps qu'Il a livré pour nous sur la
Croix, son sang qu'il a versé pour une multitude, en rémission des péchés
" (Mt 26,28).
" À travers la communion à son corps et à son sang, le Christ nous communique
aussi son Esprit " (17). " À nous, qui nous nous nourrissons du corps et du
sang de ton Fils, donne la plénitude de l'Esprit Saint, pour que nous devenions
dans le Christ un seul corps et un seul esprit. Ainsi, par le don de son corps
et de son sang, le Christ augmente en nous le don de son Esprit, déjà répandu
dans le Baptême et donné comme "sceau" dans le sacrement de la Confirmation
".
En outre les paroles " Jusqu’à ce que tu viennes " nous donnent l’occasion
de mieux découvrir les perspectives eschatologiques de l'Eucharistie: " L'Eucharistie
est tension vers le but, avant-goût de la joie plénière promise par le Christ
(cf Jn 15,11); en un certain sens, elle est anticipation du Paradis, " gage
de la gloire future ".
Ces perspectives, qui ouvrent à la communion avec l'Eglise du ciel – nous
devons toujours l’avoir présente à l’esprit et au cœur – peuvent sembler encore
très lointaines, mais elles stimulent " notre sens de responsabilité envers
cette terre ", " en jetant une semence de vivante espérance dans le dévouement
quotidien de chacun à ses propres tâches " (20).
L'appel au sens de la responsabilité vaut pour tous. Il résonne plus particulièrement
chez nous, les prêtres. Toute célébration eucharistique est destinée à réveiller
la conscience de ceux qui y participent. Pour le prêtre, elle réveille sa
responsabilité envers un monde qui doit être transformé, transfiguré par l'Eucharistie.
En prononçant ou en entendant ces mots: " Mystère de la foi ", le prêtre comprend
mieux que ce cri de la foi le pousse vers un monde où le Christ opère des
merveilles, et où il veut étendre son royaume.
Il reçoit une nouvelle lumière sur la mission sacerdotale qui lui a été confiée,
et sur le rôle qu’il doit tenir afin que la puissance de l'Eucharistie produise
tous ses effets dans chaque existence humaine. Il est responsable d'édifier
une nouvelle société dans le Christ. Et plus particulièrement, il peut donner
un témoignage de foi en cette présence nouvelle qui jaillit de chaque consécration
qui change le pain et le vin dans le corps et le sang du Seigneur.
La merveille de cette présence ouvre la porte, dans l'âme du prêtre, à une
nouvelle espérance qui va bien au-delà de tous les obstacles qui s’accumulent
sur le chemin de son ministère, souvent en butte à diverses luttes et épreuves.
Édification de l'Eglise et adoration contemplative
L'encyclique désire montrer toute la richesse spirituelle de l'Eucharistie;
d'une part elle en souligne l’apport essentiel pour édifier l'Eglise, et d'autre
part elle ne manque pas d'attirer l'attention sur la valeur du culte de la
présence réelle en-dehors de la messe.
Vatican II, en continuité harmonique avec le magistère précédent, a rappelé
que la célébration eucharistique est au centre du processus de croissance
de l'Eglise. Le Concile explique comment le royaume du Christ grandit dans
le monde: " Chaque fois qu’est célébré sur l'autel le sacrifice de la croix
par lequel le Christ, notre agneau pascal, a été immolé (1 Cor 5,7), a lieu
l'oeuvre de notre rédemption. Et en même temps, avec le sacrement du pain
eucharistique, on représente et on produit l'unité des fidèles qui constituent
un seul corps dans le Christ " (cf. 1 Cor 10,17).
Dès l’origine, on remarque une influence causale de l'Eucharistie sur le développement
de l'Eglise, comme la dernière Cène le montre avec évidence: les gestes et
les paroles de Jésus " posaient les fondations de la nouvelle communauté messianique,
le Peuple de la nouvelle alliance ". " Dès lors, jusqu’à la fin des siècles,
l'Eglise s'édifie grâce à la communion sacramentelle avec le Fils de Dieu
immolé pour nous " (21).
Le rôle constructif du prêtre apparaît dès lors : il est engagé par le Christ
dans la plus importante des oeuvres de transformation du monde, qui se réalise
avec la puissance de l'Eucharistie. À ce rôle est liée également une autre
tâche du prêtre, celle d'accueillir la présence eucharistique avec un regard
contemplatif d'adoration, et avec des égards d’extrême délicatesse.
" Le culte rendu à l'Eucharistie en-dehors de la messe, dit l'encyclique,
est d'une valeur inestimable dans la vie de l'Eglise " (25). La responsabilité
du prêtre dans ce culte est rappelée ainsi: " Il revient aux Pasteurs d’encourager,
y compris par leur témoignage personnel, le culte eucharistique, particulièrement
les expositions du Saint-Sacrement, ainsi que la pause adorante en face du
Christ présent sous les espèces eucharistiques ".
Le Pape n’encourage pas seulement tout prêtre à rendre ce témoignage, mais
lui même nous communique son propre témoignage: " il est beau de s'attarder
avec Lui (le Seigneur), et, penchés sur sa poitrine comme le disciple préféré
(cf. Jn 13,25), d’être touchés par l'amour infini de son coeur. Si, à notre
époque, le christianisme doit surtout se distinguer par son "art de la prière",
comme ne pas ressentir un besoin renouvelé de demeurer longuement en conversation
spirituelle, en adoration silencieuse, en attitude d'amour, devant le Christ
présent dans le Saint-Sacrement? Combien de fois, chers frères et sœurs, j’ai
fait cette expérience, et j'en ai reçu force, consolation et soutien " !
Il s'agit d'une expérience vivement recommandée par le Magistère constant,
comme par l’exemple de très nombreux Saints. Le témoignage personnel du Vicaire
du Christ encourage tous les prêtres, lecteurs de l'Encyclique, à faire connaître
et apprécier les moments secrets de grâce que procure l'adoration du Saint-Sacrement.
L'Eucharistie devient ainsi source d’une contemplation sanctifiante et fructueuse.
Eucharistie et sacerdoce ministériel
Le sacrifice eucharistique a un besoin absolu du sacerdoce ministériel. L'Encyclique
rappelle que pour la célébration eucharistique le sacerdoce commun ne suffit
certes pas. Selon le Concile Vatican II, " les fidèles, en vertu de leur sacerdoce
royal, concourent à l'oblation de l'Eucharistie ", mais c’est le prêtre ministériel
qui " accomplit le sacrifice eucharistique en la personne du Christ, et qui
l'offre à Dieu au nom de tout le peuple " (LG 10). Ce ministère implique la
succession apostolique, " c’est-à-dire la série ininterrompue, remontant jusqu’aux
origines, des ordinations épiscopales valides " (28). L'expression " en la
personne du Christ " signifie : " dans l’identification spécifique et sacramentelle
avec le Prêtre Souverain et Eternel, qui est l'auteur et le principal sujet
de son propre sacrifice, dans lequel en vérité personne ne peut le remplacer
".
" L'assemblée qui se réunit pour la célébration de l'Eucharistie a absolument
besoin d'un prêtre ordonné qui la préside pour pouvoir être vraiment une assemblée
eucharistique: et d'autre part elle n'est pas en mesure de se donner à elle-même
le ministre ordonné. Celui-ci est un don qu'elle reçoit à travers la succession
épiscopale qui remonte aux Apôtres. C'est l'Évêque qui, par le sacrement de
l'ordre, constitue un nouveau prêtre en lui conférant le pouvoir de consacrer
l'Eucharistie ". ( 29)
La nécessité d'un ministre ordonné est un problème dans les relations oecuméniques.
" Les communautés ecclésiales séparées de nous, dit Vatican II (Unitatis Redintegratio,
22), bien qu’il leur manque la pleine unité avec nous, et bien que nous croyons
qu'elles n'ont pas conservé la substance authentique et intégrale du Mystère
eucharistique - spécialement parce qu’il leur manque le sacrement de l'Ordre
– professent cependant dans la Sainte Cène, quand elles font mémoire de la
mort et de la résurrection du Seigneur, que dans la communion du Christ la
vie est signifiée, et elles attendent sa venue glorieuse. "
Cette règle s’impose donc : " Les fidèles catholiques, tout en respectant
les convictions religieuses de leurs frères séparés, doivent s'abstenir de
participer à la communion distribuée dans leurs réunions, pour ne pas avaliser
une ambiguïté concernant la nature de l'Eucharistie, et, par conséquent, manquer
au devoir de témoigner avec clarté de la vérité " (30).
" De même, on ne peut envisager de remplacer la Messe dominicale par des célébrations
oecuméniques de la Parole ou par des rencontres de prière en commun avec des
chrétiens membres desdites communautés ecclésiales, ou par la participation
à leur service liturgique ".
Dans les communautés catholiques, le manque de prêtres peut empêcher la célébration
eucharistique. L'Encyclique fait comprendre " combien est douloureuse et anormale
la situation d'une communauté chrétienne qui, tout en se présentant comme
une paroisse de par le nombre et la variété de ses fidèles, manque cependant
d'un prêtre pour la guider... Quand la communauté est privée du prêtre, on
cherche à juste titre à y remédier en quelque sorte, afin que les célébrations
du dimanche se poursuivent, et les religieux et les laïcs qui guident leurs
frères et leurs soeurs dans la prière exercent de manière louable le sacerdoce
commun de tous les fidèles, fondé sur la grâce du Baptême. Mais de telles
solutions ne doivent être considérées que comme provisoires, tant que la communauté
est dans l'attente d'un prêtre ". ( 32)
À cette situation il n’y a qu’un remède : " le caractère sacramentellement
incomplet de ces célébrations doit avant tout inciter l’ensemble de la communauté
à prier avec plus de ferveur, pour que le Seigneur envoie des ouvriers dans
sa moisson (cf. Mt 9,38); et cela doit ensuite la stimuler à mettre en œuvre
tous les éléments constitutifs d'une pastorale des vocations adaptée, sans
céder à la tentation de chercher des solutions dans l’affaiblissement des
qualités morales et formatives requises de la part des candidats au sacerdoce.
"
Devant les communautés qui ne peuvent pas assurer la célébration eucharistique
par manque de prêtre, le prêtre devient plus conscient de la valeur de son
engagement et de la nécessité de sa présence. Il doit aussi être convaincu
que c’est avant tout par la prière, et par la claire adhésion à son identité
ontologique – qui se manifeste forcément extérieurement – qu’il est responsable
de la naissance, de la croissance et de la fidélité des vocations sacerdotales.
Par son témoignage d’adhésion motivée et joyeuse à son identité, et par son
action apostolique, il peut contribuer à l'efficacité de la pastorale des
vocations; même si d’autres se consacrent à cette pastorale, tout prêtre est
tenu de favoriser personnellement la multiplication des vocations.
Eucharistie et communion ecclésiale
L'encyclique développe dans un chapitre spécial le thème de la communion ecclésiale.
C'est un sujet central, parce que tout le but du document est de mettre en
évidence la contribution de l'Eucharistie à l'édification et à la croissance
de l'Eglise. La communion qui caractérise l'Eglise doit être comprise dans
son sens plus profond : " L'Eglise, tandis qu’elle est ici en pèlerinage sur
la terre, est appelée à maintenir et à promouvoir aussi bien la communion
avec Dieu Trinité que la communion entre les fidèles " (34). " L'Eucharistie
apparaît comme le sommet de tous les sacrements en ce qu’elle porte à sa perfection
la communion avec Dieu le Père grâce à l'identification à son Fils unique
par l’oeuvre de l'Esprit Saint. " " Dieu s’unit à nous de l'union la plus
parfaite. C’est bien pour cela qu’il convient de cultiver dans l'âme le désir
constant du Sacrement de l’Eucharistie ".
La communion ecclésiale de l'assemblée eucharistique est communion avec son
propre Évêque, principe visible et fondement de l'unité dans son Eglise particulière;
elle est aussi communion avec le Pontife Romain, et nous pouvons ajouter:
avec l'Ordre épiscopal, avec tout le clergé et avec le peuple entier (39).
Parmi les conséquences de cette communion, nous devons remarquer une ouverture
plus ample dans le domaine oecuménique, due au fait que les frères orientaux
séparés sont plus proches de l'Eglise catholique. Quand ils demandent spontanément
à recevoir l'Eucharistie de la part du ministre catholique, en étant bien
disposés, il faut accéder à leur requête, et la réciproque est possible.
" C’est un motif de joie, dit l'encyclique Ut unum sint, de rappeler que les
ministres catholiques peuvent, en certains cas particuliers, administrer les
sacrements de l'Eucharistie, de la Pénitence, de l'Onction des malades, à
d’autres chrétiens qui ne sont pas en pleine communion avec l'Eglise catholique...
" (56), et réciproquement.
Cette disposition n’entend pas réaliser une intercommunion, mais pourvoir
à un besoin spirituel grave pour le salut éternel de fidèles particuliers.
Il suffit qu'il y ait un accord suffisant sur la doctrine de l'Eglise et sur
celle de l'Eucharistie.
Avec la foi de Marie
Nous ne pouvons pas nous étonner qu'à la fin de l'encyclique, le Pape tourne
notre regard vers la Bienheureuse Vierge Marie.
Si l'Eucharistie est mystère de la foi, ce mystère a été proposé à la foi
de Marie et il a reçu de sa part l'accueil le plus parfait. En partageant
sa foi avec nous autres prêtres, Marie nous aide à assumer notre responsabilité
dans la diffusion de l'Eucharistie pour la vie de l'Eglise, et elle nous exhorte
ainsi : " Faites tout ce qu’il vous dira " (Jn 2, 5)
© clerus.org