
La vocation
nouvelle
des gens blessés
(extrait d'un numéro spécial
" Eglise de Digne": (bulletin diocésain):
Prions le Maître de la moisson.
(1996)
Reconnaître et prendre conscience de ce que chacun
de nous est appelé par Dieu n'est déjà pas chose évidente !
Et toutes les personnes parmi nous et autour de
nous, qui ont le sentiment d'avoir échoué, d'être handicapées par la vie
…
est ce qu'elles ont encore
une vocation ?
est ce que le Seigneur
les appelle encore ?
Les blessures de la vie.
Selon
la logique humaine, nous sommes souvent classés dans une catégorie. Il y
a les "bien portants", ceux qui réussissent.
Et il y a les autres: "malades", "divorcés",
"échoués", "nuls", "criminels"…
Pour ceux ci, le passé les poursuit et semble sans
recours. De plus l'échec, la maladie, la prison ne sont souvent que la surface
qui fait soupçonner des failles et des blessures plus intérieures.
Et
Dieu dans tout cela ?
Lui
aussi laisserait-il tomber ?
Il y a déjà la terrible question du "pourquoi"
qui ne reçoit pas de réponse satisfaisante. Dieu serait-il seulement le
Dieu des "tout-va-bien" !?
Qu'il nous semble loin quand la maladie vient bousculer
nos vies, quand la mort vient enlever celui ou celle que l'on aime.
Qu'il nous semble loin quand la fidélité promise
est déçue, quand les horizons de nos vies s'obscurcissent, quant l'espoir
s'éteint …
Alors Dieu ?
La réponse
de Dieu la voici: sur la croix, alors que tout semble crier l'échec, abandonné,
humilié, confronté à l'ultime limite de la mort, Jésus jette sa confiance
dans les mains du Père.
Une dernière fois, une fois pour toutes,
le Christ s'en remet au Père comme un Dieu qui apprendrait la souffrance.
Et dans le silence qui s'est abattu sur
le monde, résonnent à nouveau les pas du Christ qui revient vers les siens.
Rendu à la vie, Il porte toujours les
blessures sur ses mains, sur son côté, lres traces de sa passion. La résurrection
n'a rein effacé, mais l'Amour a tout assumé, transformé, transfiguré. Et
dans son corps meurtri, le souvenir de la souffrance est devenu souvenir
de la fidélité.
Dans le Christ qui marche au milieu des hommes,
dans le Christ ressuscité qui montre ses plaies, c'est Dieu qui se dit à
l'homme.
C'est Dieu qui montre son visage de tendresse, d'amour
et de miséricorde.
C'est Dieu qui appelle et qui nous dit par son Fils:
" tous sont invités dans ma demeure,
et toi, viendras tu ? "
Nouvelle vocation ?
Le
Christ veut être le compagnon de tous nos chemins et de tous nos instants.
Il souffre en nous et avec nous, pour faire de chacune de nos blessure une
raison d'espérer et de grandir.
Il veut faire descendre sur nous la paix de Pâques,
pour qu'elle nous remette debout et nous habite.
Il
nous reste donc le pari fou de la confiance.
Confiance en celui qui a relevé son Fils et qui
est notre Père. Une confiance qui n'est jamais facile, mais qui nous fait
faire un pas hors de nous même.
Un pas qui nous fait basculer vers un inconnu que
nous ne connaissons pas encore.
Il nous faut laisser Dieu être Dieu, regarder
nos vies avec son regard pour qu'elles s'éclairent d'un jour nouveau. Comme
l'aube qui se lève et qui nous fait découvrir ce que la pénombre nous avait
caché.
Un
jour, un sculpteur de bois était déjà bien avancé dans un travail qui devait
devenir un chef d'œuvre. Soudainement, une flaque de goudron entacha sa
sculpture et pénétrait le bois au point d'être ineffaçable …
Le travail était à jeter …!
C'est ainsi que Dieu nous trouve … mais Dieu est
un artiste hors du commun !
Non seulement il ne jette pas, mais il sculpte à
partir de cette réalité défigurée une œuvre nouvelle où la tâche est intégrée
au point de faire partie de son chef d'œuvre que nous sommes …
La souffrance n'est pas effacée, le monde n'est pas changé.
Mais la solitude qui nous pesait tant,
se charge de sa présence.
La vie qui n'avait plus de sens nous conduit
vers un nouvel avenir.
Le péché qui nous accablait est le lieu
de sa miséricorde et la paix revient, plus grande et plus forte que tout.
Ceux
qui ont vu le visage rayonnant de grands malades à Lourdes, la sérénité
d'hommes et de femmes que la vie a blessées, le sourire d'un handicapé,
la grandeur de certains gestes de pardon …
Ceux qui ont rencontré la joie toute intérieure
de l'échoué, du divorcé qui vit sa nouvelle situation avec un cœur lucide
et serein où le souvenir du passé devient occasion de témoignage et d'exhortation
des autres …
ils savent que le cœur de l'homme a toujours des
ressources insoupçonnées.
Ils constatent que la croix du Christ, toujours
présente au cœur de nos frères, est un appel à l'espérance, à la vie, à
la Résurrection.
Rien ne peut arrêter la force salvatrice de l'amour de Dieu.
Rien n'est jamais perdu et Il nous ressuscite,
fut-ce de la débâcle telle la mort …
Voilà notre espérance chrétienne qui est appel, promesse, assurance.
Pour Dieu, c'est la continuité de son œuvre en nous.
Pour
nous cela semble à certains moments
une
nouvelle naissance,
une
nouvelle vocation, une nouvelle mission
"
selon l'Esprit du Christ "!
Prier en paraboles – Michel Hubaut – DDB
Est il vrai, Seigneur ?
Est- il vrai Seigneur, que ton cœur bondit de joie,
quand je décide de remonter la pente, de tourner le dos à mes impasses,
de repartir sur une autre route, de prendre le chemin de la vérité ?
Est- il vrai Seigneur, que tu crois encore en moi
quand moi même, désabusé, je n'ose plus me regarder ?
Est- il vrai Seigneur, que tu ne te lasse jamais
d'aimer,
que tu n'as aucune envie de me condamner,
mais que tu désires, infiniment, passionnément,
me voir heureux,
heureux d'être
un homme,
heureux d'être ton fils ?