Lorsqu'un prêtre désirant abandonner le sacerdoce est "réduit à l'état laïc" en accord avec sa hiérarchie, garde-t-il son caractère sacerdotal ?
Puisque le prêtre à son ordination devient "sacerdos ad aeternum" (contrairement aux gens mariés qui ne le sont que pour leur vie terrestre), sa réduction à l'état laïc ne devrait pas lui retirer l'interdiction de se marier. Mais s'il perd effectivement le caractère sacerdotal reçu à son ordination, il devrait pouvoir se marier à l'Eglise comme tout laïc.
Par ailleurs, y a-t-il une différence de nature entre la "réduction à l'état laïc" et la "perte de l’état clérical" qui la remplace dans le droit canon de 1983 ?
Enfin, cette "perte de l’état clérical" est-elle l'équivalent de l'annulation du mariage pour les laïcs, l'ordination étant alors considérée comme invalide pour telle ou telle raison ?



« Reconduit à l’état laïc »
Un prêtre qui perd l'état clérical conserve son sacerdoce mais ce dernier devient inopérant, inefficace, sauf en cas d'absolution d'une personne en danger de mort. La preuve en est que s'il demande à réintégrer le presbyterium, une nouvelle ordination n'est pas requise mais seulement un rescrit du Saint-Siège. Autre preuve : l'absolution valide que donne un prêtre "réduit" à quelqu'un qui est en danger de mort (application du principe de suppléance de l'Église, canon 144 du code de droit canonique).
Depuis 1983, on utilise l'expression "perte de l'état clérical" qui peut se produire de diverses manières par sanction pénale ou par grâce reçue du Saint-Père. Auparavant, on parlait de "réduction à l'état laïc". "Réduction" n'exprimant nullement un mépris pour les laïcs mais signifiant "reconduit à l'état laïc".

Mariage ou célibat ?
La perte de l'état clérical n'entraîne pas ipso facto la dispense de l'obligation du célibat. Cette dernière doit faire l'objet d'une décision supplémentaire du Saint-Père même si elle est l'objet premier de toute demande.
C'est la dispense des obligations juridiques liées à l'ordination presbytérale qui autorise ultérieurement un mariage religieux, pas la perte de l'état clérical seule.

Nullité et perte de l’état clérical
Il ne faut pas confondre nullité de l'ordination sacrée et perte de l'état clérical. La nullité de l'ordination sacrée - procédure rarissime et strictement réglementée - est l'équivalent de la déclaration de nullité de mariage. La perte de l'état clérical n'est que le dénouement de liens juridiques liés à l'ordination sacrée. La confusion opère souvent chez les fidèles qui accusent l'Église de "deux poids, deux mesures" puisque, selon eux, les prêtres peuvent être "déliés de leurs vœux" alors que les gens mariés ne le peuvent pas.
Le célibat ecclésiastique appartient à la discipline ecclésiastique de l'Église latine ; l'indissolubilité du mariage conclu et consommé est de droit divin dont nul pouvoir humain - fût-il le Pape - ne peut dispenser.

Je vous salue cordialement,


Père Jean-Marie Huet