
Source : http://www.inxl6.org
Message du Pape Jean Paul
II
pour la journée mondiale des missions 2003
C'est en 1926 que le Pape Pie XI proclame l'avant-dernier
dimanche d'octobre : journée mondiale de la mission. Aujourd'hui, dans plus
de 120 pays est célébrée la journée, semaine et même mois missionnaire pour
vivre un échange universel par l'information, la rencontre de témoins, la
prière et le partage financier.
Très chers frères et sœurs!
1. Depuis le début, j'ai voulu placer mon pontificat sous le signe de la
protection spéciale de Marie. Par la suite, à plusieurs reprises, j'ai invité
la communauté des croyants à revivre l'expérience du Cénacle, où les disciples
"étaient assidus à la prière avec [...] Marie, Mère de Jésus"
(Ac 1, 14). Déjà, dans ma première Encyclique Redemptor Hominis, j'écrivais
que ce n'est que dans un climat de prière fervente qu'il est possible de
"recevoir l'Esprit Saint qui descend sur nous et de devenir ainsi témoins
du Christ jusqu'aux extrémités de la terre, comme ceux qui sortirent du
Cénacle de Jérusalem au jour de la Pentecôte" (n. 22).
L'Eglise prend toujours plus consciente d'être "mère" comme Marie.
Elle est "le berceau, comme je l'ai fait remarquer dans la Bulle Incarnationis
Mysterium à l'occasion du grand Jubilé de l'An 2000 , dans lequel Marie
dépose Jésus et le livre à l'adoration et à la contemplation de tous les
peuples" (n.11). Elle entend poursuivre ce chemin spirituel et missionnaire,
toujours accompagnée par la Vierge Très Sainte, Etoile de la nouvelle évangélisation,
aurore lumineuse et guide sûre pour notre chemin (cf. Novo Millennio Ineunte,
n. 58).
Marie et la mission de l'Eglise en l'Année du Rosaire
2. En octobre dernier, en entrant dans la vingt-cinquième année de mon ministère
pétrinien, comme une sorte de prolongement idéal de l'Année jubilaire, j'ai
proclamé une Année spéciale consacrée à la redécouverte de la prière du
Rosaire, si chère à la tradition chrétienne; une année à vivre sous le regard
de Celle qui, selon le mystérieux dessein divin, a rendu possible, à travers
son "oui" le salut de l'humanité, et qui continue depuis le ciel
à protéger ceux qui ont recours à Elle dans les moments difficiles de l'existence.
Je forme le vœu que l'Année du Rosaire constitue pour les croyants de tous
les continents une occasion propice pour approfondir le sens de la vocation
chrétienne. A l'école de la Vierge et à son exemple, chaque communauté pourra
mieux faire ressortir sa propre dimension "contemplative" et "missionnaire".
La Journée Mondiale de Missions, qui tombe précisément à la fin de cette
année mariale particulière, pourra, si elle est bien préparée, donner un
élan plus généreux à cet engagement de la communauté ecclésiale. Le recours
confiant à Marie à travers la récitation quotidienne du Rosaire et la méditation
des mystères de la vie du Christ souligneront que la mission de l'Eglise
doit être avant tout soutenue par la prière.
L'attitude d'"écoute", que suggère la prière du Rosaire, rapproche
les fidèles de Marie qui "conservait avec soin toutes ces choses, les
méditant en son cœur" (Lc 2, 19). La méditation fréquente de la Parole
de Dieu devient un entraînement pour vivre "en communion vivante avec
Jésus à travers le Cœur de la Mère, pourrions-nous dire" (Rosarium
Virginis Mariae, n. 2).
Une Eglise plus contemplative : le Visage du Christ contemplé
3. Cum Maria contemplemur Christi vultum! Ces paroles me reviennent souvent
à l'esprit: contempler le "visage" du Christ avec Marie. Lorsque
nous parlons du "visage" du Christ, nous nous référons à son aspect
humain, à travers lequel resplendit la gloire éternelle du Fils unique du
Père (cf. Jn 1, 14): "La gloire de la divinité resplendit dans le visage
du Christ" (ibid., n. 21). Contempler le visage du Christ conduit à
une connaissance profonde et passionnante de son mystère. Contempler Jésus
avec les yeux de la foi nous fait pénétrer davantage dans le mystère de
Dieu-Trinité. Jésus dit: "Qui m'a vu a vu le Père" (Jn 14, 9).
A travers le Rosaire, nous avançons sur cet itinéraire mystique "en
compagnie de sa Mère très sainte et à son école" (Rosarium Virginis
Mariae, n. 3). Marie nous sert même de maîtresse et de guide. Sous l'action
de l'Esprit Saint, elle nous aide à acquérir cette "audace tranquille"
qui permet de transmettre aux autres l'expérience de Jésus et l'espérance
qui anime les croyants (cf. Redemptoris Missio, n.24) Tournons-nous toujours
vers Marie, modèle incomparable! Dans son âme, toutes les paroles de l'Evangile
trouvent un écho extraordinaire. Marie est la "mémoire" contemplative
de l'Eglise, qui vit dans le désir de s'unir plus profondément à son Epoux
pour marquer encore davantage notre société. Face aux grands problèmes,
face à la douleur innocente, aux injustices perpétrées avec une insolence
arrogante, comment devons-nous réagir? A l'école de Marie, qui est notre
Mère, les croyants apprennent à reconnaître dans l'apparent "silence
de Dieu" la Parole qui retentit dans le silence pour notre salut.
Une Eglise plus sainte : le Visage du Christ imité et aimé
4. Grâce au Baptême, tous les croyants sont appelés à la sainteté. Le Concile
Vatican II, dans la Constitution dogmatique Lumen Gentium, souligne que
la vocation universelle à la sainteté consiste à l'appel de tous à la perfection
de la charité.
Sainteté et mission sont deux aspects inséparables de la vocation de chaque
baptisé. L'engagement à devenir plus saints est étroitement lié à celui
de diffuser le message du salut. "Tout fidèle - rappelais-je dans Redemptoris
Missio - est appelé à la sainteté et à la mission" (n. 90). En contemplant
les mystères du Rosaire, le croyant est encouragé à suivre le Christ et
à en partager la vie, jusqu'à pouvoir dire avec saint Paul: "Ce n'est
plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi" (Ga 2, 20).
Si tous les mystères du Rosaire constituent une école importante de sainteté
et d'évangélisation, les mystères lumineux mettent en évidence des aspects
singuliers de notre "sequela" évangélique. Le Baptême de Jésus
au Jourdain rappelle que chaque baptisé est choisi pour devenir dans le
Christ "fils dans le Fils" (Ep 1, 5; cf. Gaudium et Spes, n. 22).
Lors des Noces de Cana, Marie invite à l'écoute obéissante de la Parole
du Seigneur: "Faites tout ce qu'il vous dira" (Jn 2, 5). L'annonce
du Royaume et l'invitation à la conversion sont une claire consigne pour
tous à entreprendre le chemin de la sainteté. Dans la Transfiguration de
Jésus, le baptisé fait l'expérience de la joie qui l'attend. En méditant
l'institution de l'Eucharistie, il retourne perpétuellement au Cénacle,
où le divin Maître a transmis le trésor le plus précieux à ses disciples:
Lui-même dans le Sacrement de l'autel.
Les paroles que la Vierge prononce à Cana constituent en quelque sorte l'horizon
marial de tous les mystères lumineux. L'annonce du Royaume imminent, l'appel
à la conversion et à la miséricorde, la Transfiguration sur le Mont Thabor
et l'institution de l'Eucharistie trouvent en effet dans le cœur de Marie
un écho particulier. Marie garde les yeux fixés sur le Christ, mettant à
profit chacune de ses paroles et indique à tous comment être d'authentiques
disciples de son Fils.
Une Eglise plus missionnaire : le Visage du Christ annoncé.
5. A aucune autre époque, l'Eglise n'a eu autant de possibilités d'annoncer
Jésus comme aujourd'hui, grâce au développement des moyens de communication.
C'est précisément pour cette raison que l'Eglise est appelée aujourd'hui
à faire transparaître le Visage de son Epoux avec une sainteté plus resplendissante.
Dans ce difficile effort, elle se sait soutenue par Marie. Elle "apprend"
d'Elle à être "vierge", totalement dédiée à son Epoux, Jésus-Christ,
et "mère" d'une multitude de fils qu'elle engendre à la vie immortelle.
Sous le regard vigilant de la Mère, la communauté ecclésiale croît comme
une famille ravivée par l'effusion puissante de l'Esprit et, prête à relever
les défis de la nouvelle évangélisation, elle contemple le visage miséricordieux
de Jésus dans les frères, en particulier chez les pauvres et les personnes
indigentes, ainsi que ceux qui sont éloignés de la foi et de l'Evangile.
En particulier, l'Eglise n'a pas peur de crier au monde que le Christ est
"le Chemin, la Vérité et la Vie" (Jn 14, 6) elle ne craint pas
d'annoncer avec joie "la bonne nouvelle, dont le centre, mieux encore
le contenu lui-même, réside dans la personne du Christ, le Verbe fait chair,
l'unique Sauveur du monde" (Rosarium Virginis Mariae, n. 20). Il est
urgent de préparer des évangélisateurs compétents et saints; il est nécessaire
que la ferveur ne s'affaiblisse pas chez les apôtres, en particulier pour
la mission "ad gentes". Le Rosaire, s'il est pleinement redécouvert
et valorisé, offre une aide spirituelle et pédagogique constante mais en
même temps féconde pour former le Peuple de Dieu à travailler dans le vaste
domaine de l'action apostolique.
Une consigne précise
6. Le devoir de l'animation missionnaire doit continuer à représenter un
engagement sérieux et cohérent de chaque baptisé et de chaque communauté
ecclésiale. Un rôle plus spécifique et particulier revient certainement
aux Œuvres Pontificales Missionnaires, que je remercie pour ce qu'elles
accomplissent déjà généreusement.
Je voudrais suggérer à tous d'intensifier la récitation du Saint Rosaire,
au niveau personnel et communautaire, pour obtenir du Seigneur les grâces
dont l'Eglise et l'humanité ont particulièrement besoin. J'y invite véritablement
chacun: enfants et adultes, jeunes et personnes âgées, familles, paroisses
et communautés religieuses.
Parmi les nombreuses intentions, je ne voudrais pas oublier celle de la
paix. La guerre et l'injustice naissent dans le cœur "divisé".
"Celui qui assimile le mystère du Christ, - et le Rosaire vise précisément
à cela - apprend le secret de la paix et en fait un projet de vie"
(Rosarium Virginis Mariae, n. 40). Si le Rosaire rythme notre existence,
il pourra devenir un instrument privilégié pour construire la paix dans
le cœur des hommes, dans les familles et entre les peuples. Avec Marie,
nous pouvons tout obtenir de son Fils Jésus. Soutenus par Marie, nous n'hésiterons
pas à nous consacrer avec générosité à la diffusion de l'annonce évangélique
jusqu'aux extrémités de la terre.
Avec ces sentiments, je vous bénis tous de tout cœur.
Jean Paul II, du Vatican, le 12 janvier 2003
[29/09/2003]