La situation des divorcés remariés travaille l'Eglise. Les synodes
diocésains l'ont évoqué, et beaucoup d'évêques, prêtres, diacres
expriment leur solidarité avec ces catholiques privés de sacrement.
En 1998, Mgr Noyer, évêque d'Amiens _ à l'instar de Mgr Le Bourgeois,
ancien évêque d'Autun qui avait écrit une lettre dans ce sens
au Pape _, suggérait, par exemple, que l'année jubilaire soit
l'occasion d'un geste de réconciliation envers les divorcés remariés.
En 1998 toujours, un colloque, organisé par le groupe Chrétiens
divorcés à Chevilly-Larue, marquait un tournant décisif : fruit
d'un travail de réflexion mené avec le P. Guy de Lachaux autour
du Bulletin Chrétiens divorcés Chemins d'espérance (1), ce colloque
avait réuni 140 personnes qui se situaient délibérément comme
chrétiens dans l'Eglise.
Deux types de questions avaient alors été débattues. Les premières
concernaient la décision prise par certains, en conscience, de
communier et la pratique de prières à l'occasion d'un remariage
; les secondes visaient à affirmer que les divorcés, passés par
la souffrance et l'échec, peuvent être signe et chance pour l'Eglise.
A l'issue de ce colloque, des réseaux régionaux avaient été créés.
Depuis, le groupe Relais a mené une recherche théologique et pastorale
plus approfondie, notamment lors d'une rencontre qui s'est tenue
au printemps dernier à Montpellier sur le thème « Mariage, sacrement
? Vers un catéchuménat du mariage ».
Ce week-end, 250 personnes _ divorcés, divorcés remariés, membres
d'équipes diocésaines de pastorale familiale, prêtres, diacres
_ se sont à nouveau réunies au Centre de Valpré (Rhône) autour
de trois réalités : mariage, divorce, Eglise. Trois questions
essentielles ont été abordées. Après le séisme du divorce, y a-t-il
une reconstruction possible de la personne ? Quelle est l'articulation
entre la loi et le projet de vie ? Comment notre situation de
vie dans laquelle nous ne voulons pas être enfermés peut-elle
être une interpellation, un apport positif pour la communauté
chrétienne ? Exprimer le désir d'être témoins du pardon, quitte
à être les « poils à gratter de l'Eglise »
Ni groupe de pression ni nouveau mouvement, les participants
ont surtout réfléchi sur le sacrement du mariage, l'interprétation
de la loi et la finalité de l'eucharistie qui, a rappelé le P.
Henri Denis, ecclésiologue, est « de nourrir l'Eglise ». Ils ont
par ailleurs témoigné que « l'échec ne doit pas engloutir une
vie », que « la démarche de pardon et d'abandon est libératrice
», que la loi est « indispensable », mais qu'elle s'écrit aujourd'hui,
et que c'est une « loi d'amour », que le remariage « est porteur
d'amour dans l'imperfection humaine ». Un prêtre a également dit
sa souffrance « de ne pouvoir donner le sacrement de réconciliation
». Plutôt que « d'aboyer comme des roquets », de se cacher « derrière
les pylônes des églises », tous ont par ailleurs exprimé leur
désir de témoigner du pardon, de la réconciliation, de la miséricorde,
de l'espérance, quitte à être les « poils à gratter de l'Eglise
». Plus concrètement, les participants ont échangé leurs expériences,
renforcé les réseaux, et surtout fait l'expérience d'être, eux
aussi, l'Eglise. Martine de SAUTO
Informations La Croix
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