SOURCE: Officialité de Dijon

LES CAUSES

EN DECLARATION

DE NULLITE DE MARIAGE

 

 

POURQUOI ET COMMENT

INTRODUIRE UNE CAUSE

EN DECLARATION DE NULLITE DE MARIAGE

 

 

 

1.

DEFINITION

 

Le droit du mariage des chrétiens prévoit l'éventualité de la nullité de ce sacrement. En effet, dans le sacrement de mariage, l’homme et la femme posent, en alliance avec Dieu, un acte humain, c’est-à-dire un acte qui doit être lucide et libre. La connaissance qu’ils ont de l’engagement matrimonial conforme à l’esprit évangélique, ainsi que la volonté de le contracter, doivent donc être exemptes de toute défectuosité grave.

Si le fidèle a quelque doute quant à la validité de son sacrement de mariage, il est en droit de demander à l’Eglise d’examiner son engagement. Cela se fait dans une procédure spéciale appelée “cause en déclaration de nullité de mariage”. La déclaration de nullité de mariage prend en considération une carence grave qui marque le consentement au jour du mariage, et non un échec seulement postmatrimonial.

C’est la raison pour laquelle la longueur de la vie commune, ainsi que le nombre des enfants, ne sont point des obstacles à une telle démarche. De plus, dans une sentence de nullité, personne ne laisse entendre qu’il n’y a jamais eu entre les époux de lien émotionnel, physique, moral ou personnel, ou bien que le passé est effacé comme s’il n’avait jamais existé.

Il est bien entendu que l’Officialité ne “juge” pas les conjoints pour déterminer qui a tort ou qui a raison, mais seulement la qualité de leur consentement, en répondant à la question : “le mariage célébré tel jour en tel lieu entre telles personnes, est-il valide ou non, et cela, pour quel motif ?”

 

 

2.

POURQUOI UN MARIAGE PEUT-IL ETRE DECLARE NUL ? 

 

Les motifs de la nullité sont appelés “chefs de nullité”.

Ils peuvent ainsi fonder une demande de déclaration de nullité de mariage,

et sont définis par le Code de droit canonique.

 

Voici les principaux chefs pour lesquels un mariage peut être déclaré nul :

 

  * L’inhabilité matrimoniale

en raison

 

- soit d'un grave défaut de discernement ("discretio iudicii") :

Canon 1095 - Sont incapables de contracter mariage les personnes :

1° qui n'ont pas l'usage suffisant de la raison ;

2° qui souffrent d'un grave défaut de discernement concernant les droits et les devoirs essentiels du mariage à donner et à recevoir mutuellement...

Le discernement suppose l'usage suffisant de l'intelligence et la libre volonté, c'est-à-dire une connaissance pratique de la chose à juger, la capacité de percevoir en qui on est personnellement concerné par cette chose, et la libre volonté d'en accepter pour soi les conséquences.

Le grave défaut de discernement concernant les droits et les devoirs essentiels du mariage rend incapable de contracter mariage. Il peut avoir plusieurs origines : l'immaturité grave, le manque de liberté interne, des pathologies diverses, etc.

 

- soit d’une incapacité à assumer les obligations essentielles du mariage :

Canon 1095 - Sont incapables de contracter mariage les personnes :...

3° qui pour des causes de nature psychique ne peuvent assumer les obligations essentielles du mariage.

Dans ce cas, c'est la capacité du sujet à donner l'objet du mariage qui est mise en cause. Certaines personnes peuvent consentir au mariage mais, pour des raisons de nature psychique, elles se révèlent incapables de remplir l'engagement qu'elles prennent. Autrement dit, il y a chez elle une inhabilité à assumer les obligations essentielles du mariage, à savoir par exemple la communauté de toute la vie, le bien du conjoint, la fidélité, etc...

 

 

* L’exclusion

du mariage lui-même

ou d’un de ses éléments essentiels :

Canon 1101 - § 1. Le consentement intérieur est présumé conforme aux paroles et aux signes employés dans la célébration du mariage.

§ 2. Cependant, si l'une ou l'autre partie, ou les deux, par un acte positif de la volonté, excluent le mariage lui-même, ou un de ses éléments essentiels ou une de ses propriétés essentielles, elles contractent invalidement.

Dans ce cas, il y a contradiction entre le consentement intérieur et les paroles ou signes censés exprimer ce consentement. Les paroles prononcées ("oui") paraissent signifier l'acceptation du mariage chrétien, mais en réalité, il y a exclusion soit du mariage lui-même ou de sa sacramentalité, soit d'un de ses éléments essentiels ou d'une de ses propriétés essentielles, à savoir l'unité du mariage (la fidélité à un seul conjoint), l'indissolubilité (la fidélité toujours) et la procréation. Ainsi, une personne peut exclure l'unité du mariage lorsqu'elle se marie avec la volonté manifeste de ne pas respecter la fidélité conjugale. Elle peut exclure la procréation lorsqu'elle refuse totalement et définitivement la procréation. Enfin, cette personne peut exclure l'indissolubilité lorsqu'elle rejette totalement la perpétuité du lien matrimonial.

 

 

* L'erreur

Canon 1097 - § 1. L'erreur sur la personne rend le mariage invalide.

§ 2. L'erreur sur une qualité de la personne, même si elle est cause du contrat, ne rend pas le mariage invalide, à moins que cette qualité ne soit directement et principalement visée.

D'une manière générale, l'erreur est un vice du consentement susceptible d'entraîner la nullité d'un acte juridique (canon 126).

L'erreur sur la personne est une erreur portant sur l'identité même de cette personne qu'on épouse (Jacob épouse Léa qui en fait s'est substituée à sa soeur Rachel); il s'agit alors d'un vice du consement qui invalide le mariage (canon 1097 §1).

On parle également d'erreur sur une qualité de la personne. S'il n'y a erreur que sur une qualité accidentelle (par exemple le fait d'être riche ou pauvre), le mariage est valide. En revanche, si la qualité est "directement et principalement visée" par l'autre contractant, elle devient substantielle et le consentement matrimonial est vicié (canon 1097 §2).

 

* Le dol

Can. 1098 - La personne qui contracte mariage, trompée par un dol commis en vue d'obtenir le consentement, et portant sur une qualité de l'autre partie, qui de sa nature même peut perturber gravement la communauté de vie conjugale, contracte invalidement.

Le dol est une tromperie qui entraîne un vice du consentement. Il doit être commis en vue d’obtenir le mariage et doit porter sur une qualité essentielle de l’autre partie (par exemple, lorsqu'un élément de la vie d'un contractant - une maladie, une stérilité - est délibérément caché).

 

 

 

* La violence ou la crainte grave externe

Can. 1103 - Est invalide le mariage contracté sous l'effet de la violence ou de la crainte grave externe même si elle n'est pas infligée à dessein, dont une personne ne peut se libérer sans être forcée de choisir le mariage.

 Un des contractants se trouve aux prises avec une pression telle qu'il est "forcé" au mariage. La crainte est l'effet psychologique d'une menace ou d'une contrainte physique ou morale. On parlera par exemple d'une grave crainte "révérentielle" d'un fils ou d'une fille vis-à-vis de ses parents.

 

 

Ces chefs de nullité doivent, après instruction, être prouvés.

 

 

 

3.

LA PROCEDURE A SUIVRE

 

Comment s'y prendre ?

 

* Le conjoint qui souhaite un jugement de l’Eglise quant à la validité de son mariage, commence par s’adresser à un avocat ecclésiastique, qu’il peut choisir sur une liste disponible au siège de son Evêché (pour le diocèse de Dijon : 20 rue du Petit-Potet, Dijon - 21000) ou dans les annuaires diocésains.

Les avocats ecclésiastiques sont spécialement formés à ce genre de procédure et ont reçu un agrément des Evêques.

Ils remplissent ainsi un service d’Eglise et ne demandent pas d’honoraires.

 

* La partie demanderesse expose sa situation à l’avocat qu’elle a choisi.

Le rôle de ce dernier est

a) de discerner l’opportunité d’une telle démarche ainsi que son fondement canonique;

b) d’aider la personne à constituer son dossier (une requête officielle, un résumé des faits, une liste de témoins et autres preuves); ce dossier peut alors être envoyé à l'Officialité;

c) d’assister et de représenter l’intéressée tout au long de la procédure.

 

* En ce qui concerne la détermination du Tribunal ecclésiastique compétent, plusieurs hypothèses sont possibles.

La requête pourra principalement être adressée

- soit au tribunal du diocèse dans lequel le mariage a été célébré,

- soit au tribunal du diocèse dans lequel est domicilié l’autre conjoint,

- soit au tribunal du diocèse dans lequel le plus grand nombre de preuves pourra être recueilli.

 

* L'Official qui reçoit un dossier de demande de déclaration de nullité de mariage constitue un tribunal dont il fait généralement partie.

Après admission de la requête et détermination du ou des chefs de nullité retenus ("le doute"), la cause peut être instruite.

L'instruction commence par la déposition des époux, chaque conjoint étant entendu séparément. Si l'autre conjoint ne veut pas participer au procès (personne ne peut l'y contraindre), la procèdure continuera sans lui.

Ensuite, le juge instructeur procède à l'audition des témoins désignés par chacune des parties ou convoqués sur sa propre décision. Il recueille également les documents éventuellement utiles à l'examen de la cause.

Il peut aussi faire appel aux services d'un expert : médecin psychiâtre, psychologue, graphologue, etc...

Au terme de cette instruction et après avoir pris connaissance des actes de la cause, l'avocat de la partie demanderesse (ou les deux avocats si chaque époux en a un) présente par écrit sa plaidoirie.

Dans les procès matrimoniaux intervient le "défenseur du lien" dont le rôle est de défendre - avec réalisme - le lien du mariage (un peu comme le procureur d'un tribunal civil). Après avoir pris lui aussi connaissance du dossier et reçu la plaidoirie de l'avocat, le défenseur du lien rédige à son tour ses remarques.

A la fin, le collège des trois juges ecclésiastiques nommés se réunit et tranche. Une sentence est rédigée par l'un d'entre eux appelé "ponent".

Si la nullité du mariage est reconnue, cette décision doit être confirmée par une Officialité de deuxième instance (en l'occurrence, l'Officialité interdiocésaine de Besançon). Il faut en quelque sorte 2 "oui" pour que la déclaration soit définitive.

Si la décision du premier tribunal ecclésiastique est négative, la partie demanderesse peut faire appel dans les quinze jours.

Si la décision de l'Officialité de deuxième instance infirme la première décision, la partie demanderesse peut en appeler à une troisième instance (le Tribunal de la Rote romaine).

 

Cette procédure est caractérisée par la confidentialité, dans le souci du respect de la vie privée des personnes, de la paix des familles et de la liberté de parole des différents témoins. Seuls les juges, le défenseur du lien, les avocats et procureurs des parties ont accès aux pièces du dossier.

 

 

Combien de temps cela dure-t-il ?

Aux termes du canon 1453 du Code de droit canonique et dans la mesure du possible, “Les juges et les tribunaux veilleront à ce que, la justice étant sauve, toutes les affaires soient terminées le plus tôt possible; en première instance, elles ne seront pas prolongées au-delà d’une année partir de l'envoi de la requête à l'officialité), et en deuxième instance, au-delà de six mois”.

 

 

Combien cela coûte-t-il ?

Le fonctionnement de ce service d’Eglise entraîne des frais qui sont assumés par la Communauté chrétienne (personnel, locaux, bureautique, téléphone, déplacement, etc). Il est normal que la partie demanderesse y participe, dans la mesure de ses moyens.

Un forfait lui est donc demandé, à savoir - en 2002 - la somme de 426 euros (2800frs environ). Un acompte de 153 euros (1000 frs environ) est joint aux documents introduisant la cause.

Si celle-ci a nécessité la nomination d'un expert ou d'un avocat-procureur ou encore des indemnités de déplacement, ces frais sont à la charge du demandeur.

Cependant, une aide judiciaire, totale ou partielle, ou encore des aménagements dans le réglement, est toujours possible en cas de besoin.

 

 

Au terme de cette présentation rapide et partielle, il ressort qu'une Officialité traite de situations juridiquement complexes. Ainsi, dans le domaine matrimonial, l'Eglise au fil des siècles, a développé des procédures pour répondre à certaines demandes qui lui étaient adressées par des fidèles en situation d'échec conjugal, dans la mesure où la loi du Christ le lui permettait et pour le bien des âmes. Conçues pour protéger le bien des personnes sans qu'il soit porté atteinte à l'institution matrimoniale, ces procédures, même si elles paraissent un peu lourdes à ceux qui les entreprennent, ont un rôle pastoral important : elles permettent à certains, dans certaines conditions, de retrouver la paix intérieure et un statut parfois renouvelé au sein de la communion ecclésiale.

 

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